Husdjuret - Camilla Grebe
472 pages, Le Livre de Poche, janvier 2019
L'histoire :
Il y a huit ans, Malin, alors adolescente, a découvert une fillette enterrée dans la forêt de Ormberg, une ville suédoise isolée. On n'a jamais pu identifier la petite victime. Devenue une jeune flic ambitieuse, Malin est affectée auprès de Hanne, la célèbre profileuse, et de l'inspecteur Peter Lindgren qui reprennent l'affaire. Mais Peter disparaît du jour au lendemain, et Hanne est retrouvée blessée et hagarde dans la forêt. L’unique témoin est un adolescent qui erre dans les bois. Sans le dire à personne, celui-ci récupère le journal que Hanne a laissé tomber et se met à le lire, fasciné... Désormais seule dans son enquête, Malin est appelée sur les lieux du tout premier crime : une nouvelle victime a été découverte. Et si tous ces faits étaient tragiquement liés ?
Mon avis :
Comme beaucoup d'amateurs de polars, j'ai un faible pour les romans nordiques. Il y a quelque chose de spécial dans l'ambiance, les décors et la manière de décortiquer les personnages qui m'attire et me plaît beaucoup. Camilla Grebe fait assurément partie de mes auteurs favoris dans ce domaine. J'ai lu trois de ses romans cette année et elle me scotche à chaque fois ! Je trouve qu'elle arrive à surprendre et à se renouveler constamment. Les sujets qu'elle aborde sont toujours d'actualité et nous poussent à réfléchir. Impossible de reposer ses livres sans s'interroger sur notre société et ce monde qui tourne de moins en moins rond ou sans se demander si nous aurions fait les mêmes choix que les personnages ou réagit différemment. Et pourtant, il y a dans ses pages une fluidité de lecture incroyable malgré la gravité des thèmes abordés. Ses romans ne se lisent pas, ils se dévorent ! On n'arrive pas à les lâcher et on ne voit pas le temps passer !
"Le Journal de ma disparition" a su m'intriguer et me captiver dès les premières lignes. J'ai aimé le fait que l'on change de narrateur. Ici, on alterne entre Malin, Jake et Hanne. Trois personnages très différents mais aussi intéressants les uns que les autres. Une enquêtrice ambitieuse qui revient mener l'enquête dans la ville de son enfance, un endroit qu'elle cherche à fuir à tout prix. Un ado mal dans sa peau qui s'est trouvé au mauvais endroit au mauvais moment mais ne peut pas en parler. Une profileuse qui détient des éléments clés mais est en train de perdre la mémoire. Et puis, bien sûr, Ormberg, ville triste et terne que beaucoup désertent alors que certains y croupissent. Un endroit où tout le monde se connaît, où les usines et les magasins sont fermés, où les carcasses de voitures et les détritus s'entassent dans les jardins, où tout le monde semble avoir enterré ses rêves et ses ambitions... Tout ce que Malin a cherché à fuir en s'installant en ville. Et au milieu de tout cela, des réfugiés que certains tentent d'aider et que d'autres montrent du doigt. Une atmosphère particulière qui met mal à l'aise et ne donne pas franchement envie de s'éterniser là-bas...
J'ai adoré cette histoire. L'intrigue est vraiment prenante, pleine de surprises et de rebondissements, et l'auteure n'épargne pas ses personnages. On les voit souffrir, on découvre leurs failles et ils nous paraissent authentiques et sincères. Je me suis beaucoup attachée à certains. Il y a des propos qui m'ont vraiment dérangée et j'ai mis un peu de temps à comprendre que c'était le but recherché et qu'il ne s'agissait absolument pas du point de vue de l'auteure sur ces sujets. Ormberg est un personnage à part entière dans le roman. C'est un endroit difficile à décrire. Malin a une véritable aversion pour cette ville qui concentre tout ce qu'elle essaie de fuir et tout ce qu'elle ne veut pas être : les commérages, l'ignorance, l'absence d'ambition et d'évolution, les esprits étriqués... Et en même temps c'est intéressant car elle ne peut pas s'empêcher de défendre les gens qui y vivent et leur manière d'être. C'est elle qui les comprend le mieux. Les personnes qui y sont depuis toujours s'y sentent bien et n'imaginent pas un instant en partir mais d'un point de vue extérieur c'est un lieu triste et déprimant. C'est comme si les gens qui y vivent avaient des œillères et ne se rendaient pas compte de tout ce qu'ils pourraient trouver ailleurs. Ils sont comme prisonniers mais n'en ont pas conscience (on se croirait à Storybrook - en beaucoup moins joli et bien plus déprimant !). L'auteure a vraiment fait un travail remarquable et je crois que l'on connaît tous ce genre d'endroits. C'est comme si tout avait déserté : les entreprises, les gens, le soleil, l'espoir, l'avenir... On a l'impression d'en être prisonnier aussi et cela rend l'atmosphère encore plus pesante. J'ai adoré ça !
L'intrigue est bien menée, le suspense présent jusqu'au bout et la manière dont l'histoire est racontée - notamment au travers du journal d'Hanne qui est en train de perdre la mémoire - ne manque pas d'originalité. J'avais adoré mes précédentes lectures signées Camilla Grebe - "L'énigme de la stuga" et "Un cri sous la glace" - mais j'ai encore bien plus aimé "Le Journal de ma disparition". Il y a beaucoup de rebondissements et l'intrigue est complexe mais ça tient vraiment la route. On y croit et on ne peut que refermer ce livre à bout de souffle et estomaqué par cette histoire vraiment dingue et incroyablement sombre ! Pour moi, il n'y a aucun bémol. Bon, peut être le fait que Peter soit un peu oublié et qu'on n'en parle pas plus dans la dernière partie du livre, mais c'est vraiment pour trouver quelque chose car tout le reste est vraiment top ! Pour tout vous dire, je pense que je vais avoir du mal à me concentrer sur autre chose car cette histoire occupe tout mon esprit. Quelle claque !
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