Une fois n'est pas coutume, j'ai décidé de ne pas vous mettre le résumé présent sur la quatrième de couverture, car je trouve qu'il en dit beaucoup trop et ne représente pas bien l"univers du livre. Je vais essayer de vous présenter l'histoire à ma façon.
Jette est une fille de 19 ans, qui après le divorce de ses parents, a décidé de prendre son envol et de se débrouiller toute seule. Elle vit en colocation avec ses deux meilleures amies, Caro et Merle, qui partagent leur temps entre le lycée et des petits boulots pour subvenir à leurs besoins. Elles ont toutes les trois des problèmes de famille et essaient de s'en sortir malgré tout. La mère de Jette écrit des polars qui ont beaucoup de succès, et s'intèresse de près à une affaire de meurtres qui effraie toute l'Allemagne, pour écrire son prochain roman. Le tueur a violé et tué plusieurs jeunes filles. Il leur coupe les cheveux et leur vole leur collier avant d'abandonner leur corps en forêt. Lorsque l'une des trois meurt à son tour, les deux autres mettent tout en oeuvre pour trouver le coupable...
Ce roman a reçu beaucoup de critiques négatives, mais j'étais quand même curieuse et j'ai été moi aussi très attirée par la couverture. Je peux vous dire que je suis bien contente d'être passée outre ces mauvaises critiques puisque j'ai vraiment beaucoup apprécié ce livre. Pour commencer, je le trouve vraiment très bien écrit, ce qui est déjà un très bon point. J'ai aimé l'atmosphère lourde et pesante de ce roman, ainsi que les nombreuses descriptions qui m'ont, pour une fois, séduites. J'ai vraiment senti l'odeur des fraises, le soleil sur la peau, la sueur des cueilleurs de fraises et je me suis imaginée sans peine dans un endroit comme "le moulin" (la maison de la mère de Jette).
Je pense que le principal problème de ce livre, qui n'en est pas un pour moi, mais qui en est un pour beaucoup de lecteurs, est que le public n'est pas bien ciblé. La couverture et la collection font penser à Twilight donc beaucoup devaient s'attendre à une histoire dans le même esprit, ce qui n'est pas du tout le cas. Il n'y a rien de fantastique ici, l'histoire est noire, très noire et les faits bien réels. De plus, ce roman est classé dans la section jeunesse, or je pense qu'il n'est vraiment pas adapté aux jeunes lecteurs. Comme je l'ai dit précédemment, l'histoire déjà est vraiment très sombre, on parle de meurtres, c'est le thème principal du livre. Et puis le style de l'auteur est loin d'être facile pour de jeunes lecteurs. Les mots ne sont pas forcément complexes, mais le rythme est lent, il n'y a pas beaucoup d'action. Je peux comprendre que de jeunes lecteurs se soient ennuyés Le livre est surtout rempli de descriptions qui mettent en place l'atmosphère pesante du livre, et la lenteur ne m'a absolument pas gênée. Je trouvais au contraire que ça allait avec l'esprit du livre et l'ambiance créée par l'auteur. Je pense que beaucoup s'attendaient à une histoire plus légère.
J'ai beaucoup aimé le personnage d'Imke, la mère de Jette. Les réflexions sur l'écriture sont très intéressantes. Elle est constamment prise par ses réflexions sur son prochain livre. Même sa fille se sent parfois mal à l'aise parce qu'elle se reconnait dans les livres de sa mère et constate l'influence de leur vie sur ses écrits. Elle ne peut s'empêcher d'être inspirée par ce tueur, par le policier qui enquête sur l'affaire. Et si en s'y intéressant elle attirait le malheur sur leur vie? Elle ne peut s'empêcher de s'interroger, voire de culpabiliser.
C'est vraiment un livre intéressant. Je le trouve beaucoup plus proche d'un livre comme La Mort dans les bois (Tana French) qui est un policier qui avance lentement, où l'auteur creuse les personnages davantage que l'enquête policière (livre que j'avais adoré), que de romans jeunesse comme Twilight ou Maudites (Michelle Zink) de la collection New Moon. Je pense qu'il plaira davantage aux adultes qu'aux enfants ou adolescents, c'est même sûr. Je le déconseille aux plus jeunes, et pas seulement pour l'aspect policier. J'ai vraiment beaucoup apprécié ce livre, et je suis bien contente d'avoir eu le courage de le lire malgré les critiques qui ne me donnaient vraiment pas envie. J'ai très envie de retrouver les personnages dans une nouvelle aventure, et je compte bien lire Le Peintre des visages prochainement.
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" C'était affreux de lire cet article. De savoir qu'il allait déclencher chez les gens ce frisson, mélange d'effroi et de bien-être, qui se produisait lorsqu'on apprenait une mort tragique - parce qu'on était sain et sauf et qu'on se contentait d'en lire le récit. Comme au spectacle, dans une loge. En sécurité. De là-haut, on ne distinguait pas le danger. Tout restait parfaitement ordinaire."
" Au cours de la réunion matinale, le patron avait évoqué à plusieurs reprises "notre meurtrier". Bert avait beau savoir qu'il s'agissait d'une formule creuse, employée sans réfléchir par quantité de fonctionnaires de police, il s'était retenu de se ruer sur lui.
"Notre meurtrier." Une expression aux accents redoutablement familiers. En revanche, personne n'aurait jamais osé évoquer "nos mortes". De quel côté étaient-ils?
" - On n'est que des fourmis ! On s'affaire, on s'active dans tous les sens, et peu importe si on se fait faucher, parce que toutes les autres continuent à s'affairer, à s'activer sans nous.
- Chut ! fit Merle en me fourrant du pop-corn dans la bouche.
Elle avait raison. Rien dans la vie n'était assuré. Il fallait rire et manger du pop-corn, tant qu'on le pouvait."
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