Go As A River - Shelley Read
366 pages, éditions Robert Laffont, mars 2024
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L'histoire :
Victoria Nash a dix-sept ans, et elle gère d'une main de maître le verger de pêches de son père, à Iola, petite ville du Colorado nichée entre les montagnes de la Big Blue Wilderness et la rivière Gunnison. Lorsqu'elle rencontre par hasard Wilson Moon dans les rues d'Iola, la vie semble lui sourire. Wil est un jeune vagabond au passé mystérieux, à la peau brune et aux yeux aussi noirs et brillants que des ailes de corbeau. L'étincelle qui s'allume entre eux va déclencher autant de passion que de malheurs.
Au coeur des lacs, des montagnes, des rivières, Victoria doit faire face aux changements de son temps tout en sauvant sa propre vie et celle de son verger.
Mon avis :
C'est d'abord le titre et la couverture qui m'ont donné envie de lire ce roman. De l'histoire, je ne savais pas grand chose. D'ailleurs, il me semble que je n'avais même pas lu la quatrième de couverture. J'aime de plus en plus me laisser surprendre et ne pas trop savoir où je mets les pieds. C'est un peu risqué, mais en général je suis agréablement surprise et ça a été le cas ici. Quelle belle lecture !
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J'ai été séduite dès les premières lignes par la plume délicate et poétique de Shelley Read. L'histoire qui nous est racontée est très dure, mais on ne tombe jamais dans le pathos. Tout est fait avec beaucoup de sensibilité et de justesse. On y croit et on s'attache tout de suite à Torie que l'on va suivre durant plusieurs décennies. Cette jeune fille ne va pas être épargnée et va devoir subir de nombreuses épreuves mais au lieu de s'effondrer, elle va faire preuve de beaucoup de courage et de résilience. Parce que parfois une rencontre, un instant, un mot, quelques moments peuvent modifier le cours d'une vie et changer votre philosophie, votre regard sur le monde. Parce que l'on peut choisir de vivre malgré tout et se dire que ce sont ces épreuves qui font de nous ce que nous sommes...
J'ai été profondément émue par la vie de Victoria, par la manière dont elle bascule d'un coup dans l'âge adulte. On la voit se relever, se construire, s'affirmer, devenir une femme forte et indépendante qui sait ce qu'elle veut. On la voit se démarquer de sa famille, remettre en question ce qu'on lui a inculqué tout en conservant certaines valeurs. J'ai aimé le fait que la nature prenne autant de place que les hommes, dans cette histoire. On parle beaucoup du décor, des montagnes, des rivières, de ce village complètement immergé sous l'eau, de la culture des pêches, de l'amour et du respect de la terre. C'est un récit aussi captivant qu'émouvant qui nous transporte dans le Colorado. J'ai pris mon temps pour le lire car je voulais savourer chaque période et prendre le temps de relire des passages que je trouvais particulièrement beaux. Je me suis complètement immergée dans cet univers et j'en ai encore des images plein la tête. Des sujets graves et essentiels sont abordés et j'ai trouvé qu'ils l'étaient de manière juste et sincère. J'ai notamment beaucoup apprécié la manière dont on aborde la maternité et les relations familiales ainsi que tout ce qui nous construit. Qu'est-ce qui fait de nous ce que nous sommes ? Notre passé ? Notre famille et notre éducation ? Le milieu dans lequel on vit ? Les épreuves de la vie ? Nos choix personnels ? Les réactions des personnages m'ont semblé crédibles et j'ai aimé la délicatesse et la pudeur avec lesquelles Shelley Read nous les délivre. C'est un bel hommage à la nature et aux femmes, à leur force et à leur complexité. C'est un très beau roman à lire et à faire découvrir autour de soi.
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"En ne montrant en surface qu'une petite partie de sa vie intérieure, une femme offrait moins à piller aux hommes". (page 49)
"Je doute que maman m'eût aidée si elle avait été en vie. Mais le seul avantage d'avoir une mère morte, c'est qu'on peut faire d'elle une alliée inébranlable, qu'elle l'eût été ou non." (page 55)
"Parfois, une femme se divise en deux. Parfois, au moment où quelqu'un qu'elle aime profondément s'éloigne, elle offre au monde une image stoïque, pleine de dignité et d'abnégation, pendant que son moi intime hurle et court après cet être aimé et l'attrape et le plaque au sol en le suppliant de rester." (page 329)
"Une femme n'est pas qu'un simple réceptacle destiné à porter des bébés et du chagrin." (page 344)