La Vie
de Régis de Sá Moreira
Catégorie(s) : Littérature francophone
Edition / Collection : Au Diable Vauvert
Date de parution : 22 août 2012
Nombre de pages : 120
Prix : 15€
L'histoire : Des personnages se succèdent et se croisent, auxquels on s’attache le temps de quelques lignes, d’une pensée, d’un fragment d’histoire, par une fenêtre ou un rideau, un souvenir, un quai de métro, un souffle, tout ce qui tisse le fil du hasard. L’étudiante, le jardinier, la star, l’astronaute, l’enfant, le boulanger, le prof d’histoire, et même des morts ou le Pape… ont pourtant un point commun : cette vie continue, qui coule, circule d’âme en âme, et nous relie. Pris de vivacité et de fraîcheur, on entre surpris, promené comme à la marelle par un texte profond et tendrement drôle. Vite on en savoure chaque paragraphe, on le relit, on reconnaît les personnages, on se demande où cela va nous mener. Peu à peu, on devient l’autre, tous les autres, le texte déborde nos vies. On se surprend à regarder autour de soi, à observer son voisin. La vie est un miraculeux hommage à la communion muette des âmes, à notre humanité.
Régis de Sa Moreira est un auteur que j'apprécie beaucoup. J'ai lu quasiment tous ses romans : Le Librairie, Zéros tués, Mari et femme et à chaque fois je suis charmée par sa façon d'écrire et de parler de la vie. Avec ce nouveau roman, il fait encore plus fort ! Il nous raconte la vie, le quotidien, les autres en faisant parler une multitude de personnages. La construction du roman est originale et étonnante. L'histoire commence par un personnage que l'on suit durant seulement quelques lignes, il croise quelqu'un ou pense à une personne (un passant, son boucher, un collègue de travail, sa femme,... etc) et lui cède la parole. C'est l'autre personnage qui devient narrateur à son tour durant quelques lignes avant de passer le relai à un autre. On accède aux pensées de chacun qui se succèdent paragraphe après paragraphe. C'est un exercice étonnant dans lequel on rentre facilement. On entend les voix de tout le monde, on se reconnait un peu en eux, on y croise un voisin, un ami, leurs pensées se font écho. Quel bel hommage à la vie ! C'est un récit tendre et drôle dont on savoure la moindre phrase. On est ému, on rit, on sourit et on s'amuse du hasard et de la vie. Pour vous donner un exemple concret, un personnage regarde un film qu'il trouve vraiment lamentable et dans le paragraphe suivant c'est le scénariste qui défend son travail et explique comment il en est arrivé à écrire cette histoire. Ces échanges donnent lieu à des situations vraiment très amusantes. Les personnages se répondent et c'est amusant de voir comme ils se trompent parfois sur les intentions et les pensées de leur voisin. Il n'y a pas que les vivants qui ont la parole ! Les morts et les ancêtres ont la part belle aussi dans cette drôle d'histoire qui résonne dans nos têtes à la manière d'un éclat de rire.
Tantôt drôles, tantôt dramatiques, parfois crues et cyniques, les paroles et pensées de chacun nous offrent un concentré de vie et de bonne humeur. C'est un récit vraiment intéressant et passionnant, aussi bien pour son fond que pour sa forme. J'ai passé un merveilleux moment. Je me suis demandée comment tout cela allait pouvoir se terminer et la fin ne m'a pas déçue. Elle est parfaite, tout simplement... Encore une fois, Régis de Sa Moreira ne m'a pas déçue. Il a su m'émouvoir et me surprendre. C'est un récit décalé et plein de vie qu'il ne faut surtout pas manquer.
"Maudit soit internet. Avant il y avait la télé, c'est vrai, mais la télé on pouvait l'ignorer, faire l'amour devant même. La télé c'était personne, Internet c'est tout le monde. On n'est jamais entre nous, jamais tranquilles, jamais seuls. Je ne dis pas que c'était mieux avant, je dis que c'est pire maintenant."
"Je l'aime. Il fallait bien que quelqu'un l'aime et c'est tombé sur moi. Je n'ai pas choisi, c'est la vie qui me l'a mis dans les bras, je n'ai pas choisi mais disons que j'ai accepté. Je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il vaut mieux aimer un gros con que ne pas aimer un type génial. C'est l'amour qui compte, pas les petites personnalités, sinon il y a longtemps que tout le monde se détesterait. On resterait tout le temps seul comme notre voisine d'en face..."
"Ce que je préfère dans la solitude c'est que personne ne sait ni même ne s'intéresse à ce que je fais. Là par exemple, il est presque 2 heures du matin, je peux me lever, faire semblant que c'est le matin, m'habiller comme un sac, prendre un taxi pour aller à la gare boire un café et revenir me coucher, personne ne le saura jamais ! Même sur mon lit de mort, je serai la seule à savoir que j'aurai fait ça une nuit..."
"Une fois qu'on est en paix complète avec soi-même, on s'emmerde assez vite."
"Mes frères et soeurs me manquent tout le temps, c'est idiot la famille. On passe des années à se chamailler pour apprendre à vivre ensemble et quand on y arrive enfin, quand on a enfin l'âge de s'aimer comme des grands, chacun part de son côté pour créer une nouvelle famille..."
Merci à la librairie Dialogues et aux éditions Au Diable Vauvert pour cette découverte en avant-première.