The Colour of Milk - Nell Leyshon
187 pages, éditions 10/18, septembre 2015
L'histoire :
1831. Mary une jeune fille de 15 ans mène une vie de misère dans la campagne anglaise du Dorset. Simple et franche, mais lucide et entêtée, elle raconte comment, un été, sa vie a basculé lorsqu'on l'a envoyée chez le pasteur Graham, pour servir et tenir compagnie à son épouse, une femme fragile et pleine de douceur. Avec elle, elle apprend la bienveillance. Avec lui, elle découvre les richesses de la lecture et de l'écriture... mais aussi obéissance, avilissement et humiliation. Un apprentissage qui lui servira à coucher noir sur blanc le récit tragique de sa destinée. Et son implacable confession. Nell Leyshon réalise un travail d'orfèvre avec ce portrait inoubliable, où vibre la voix lucide et magnifique de son héroïne.
Mon avis :
J'étais vraiment impatiente de découvrir ce roman et j'ai totalement craqué sur la couverture de l'édition de poche. Je la trouve magnifique ! J'avais lu un peu partout que ce roman était assez déroûtant alors j'avais quelques appréhensions, mais en fait le style d'écriture bien que particulier ne m'a pas gêné du tout, bien au contraire. Les fautes et les maladresses de Mary, la narratrice, rendent ce récit encore plus touchant et on a vraiment l'impression de lire quelque chose de très intime.
On découvre la vie dans la campagne anglaise des années 1830, le quotidien et le travail à la ferme mais aussi la vie des gens plus aisés. On voit la vie de Mary, quinze ans, changer du jour au lendemain sans que personne ne lui demande son avis et ne se soucie de son bien-être. Pour ses parents qui auraient tant aimé avoir des garçons mais n'ont eux que des filles, elle n'est qu'une paire de bras supplémentaires et par la suite un moyen d'obtenir un peu d'argent. Mary ne semble pas en souffrir puisqu'elle ne connaît rien d'autre. Elle n'est jamais allée ailleurs qu'à la ferme et n'imagine pas qu'on puisse vivre autrement. Mais le destin de Mary qui semblait tout tracé va basculer irréversiblement... De la vie à la ferme avec ses soeurs et ses parents tyranniques, elle devient domestique chez un pasteur. Elle tient compagnie à sa femme, aide aux tâches ménagères, et découvre un univers totalement différent du sien. Le naturel, l'innocence et la spontanéité de la jeune fille vont rapidement séduire le couple et la jeune Mary va découvrir la magie des mots à leurs côtés.
A la fois tragique, émouvant et bouleversant, ce récit est une petite merveille. On y parle de la nature et du quotidien avec beaucoup de simplicité et pourtant, beaucoup de lumière et de poésie en ressortent. Il y a de superbes descriptions et des passages délicieux. J'ai notamment adoré la complicité qui unit Mary et son grand-père, ce vieil homme attachant qui vit au milieu des cageots de pommes ainsi que les saisons que l'on voit défiler. Mais il y a aussi des passages révoltants durant lesquels on voudrait pouvoir faire quelque chose pour aider la pauvre Mary. On se sent totalement impuissant face à tout ce qui lui arrive. J'ai trouvé cette héroïne très attachante. Elle est naturelle et dit toujours tout ce qu'elle pense. Elle a une façon de s'exprimer qui la rend unique et inoubliable. On voudrait tellement pouvoir intervenir... Que c'est frustrant !
En quelques mots :
Voilà une lecture que je ne risque pas d'oublier. Un récit poétique, lumineux mais également tragique et bouleversant. Une histoire rythmée par la ronde des saisons et les tâches quotidiennes du XIXème siècle. Un récit vibrant et révoltant porté par une héroïne inoubliable qui aspire à la liberté et à l'émancipation. Magnifique et terriblement émouvant ! A découvrir absolument !
Quelques extraits :
"quand je suis triste je dois faire un effort pour me souvenir pourquoi. sinon je redeviens heureuse."
"et moi je demanderais quoi si je pouvais faire un voeu ? qu'est-ce que je répondrais si on me posait la question ? je n'en avais aucune idée. je savais que j'avais des rêves mais je ne savais pas lesquels."
"quand on a un bébé on a l'impression qu'il est toute notre vie et on n'imagine pas que l'enfant grandira, qu'un jour il n'aura plus besoin de nous et qu'il voudra partir. [...] on renonce à tout pour s'en occuper et le protéger puis il s'en va. c'est comme s'il t'avait consumé pour construire sa propre vie. "
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